20 novembre 2025

Temps de lecture : 5 min

“Nos salons doivent refléter les transformations durables des filières qu’ils représentent” Morgan Lavielle

Échange avec Morgan Lavielle, Directeur Communication et RSE de Compexposium, qui revient pour nous sur la politique RSE du groupe - de la genèse de cette démarche à son déploiement - et les enjeux qui se profilent.

A quand remontent les engagements RSE du groupe Comexposium ?

Le Groupe mène depuis plusieurs années des actions RSE sur ses salons, à l’instar du réemploi de stands équipés propriétaires ou de partenariats associatifs. C’est en 2022 que la stratégie d’engagement du Groupe a été consolidée. La crise du Covid 19 a accéléré la prise de conscience des enjeux de durabilité chez tous les organisateurs, et plus globalement pour l’ensemble du secteur événementiel. Là où auparavant les initiatives étaient disséminées et propres à chaque événement, nous avons décidé d’aborder la RSE dans son cadre global, et d’y inclure, au-delà de l’angle opérationnel et logistique, les enjeux d’accessibilité, d’inclusion, de qualité de vie au travail, et naturellement de gouvernance. C’est dans ce contexte qu’a été créée la direction RSE du Groupe Comexposium.

Comment avez-vous construit la stratégie qui continue de se déployer aujourd’hui ?

Nous avons commencé par écouter toutes nos parties prenantes. C’est essentiel dans un groupe comme le nôtre qui orchestre, dans près de 20 pays, un portefeuille d’événements allant de Foire de Paris au SIAL en passant par les salons de l’Etudiant. Nous avons mené un audit interne et externe avec un cabinet de conseil, analysé les actions menées, interrogé nos équipes, nos filiales, nos partenaires. Une démarche préalable qui a pris neuf mois.

Ensuite, nous avons conduit une analyse de matérialité, que nous avons fait évoluer depuis pour intégrer les enjeux de double matérialité, devenus aujourd’hui la norme. Elle nous a permis de mesurer les attentes des exposants, des visiteurs, des clients, et d’identifier les sujets maîtrisés et requis. Ce travail a servi de base à la construction de notre stratégie.

Mi 2023, nous avons présenté notre stratégie All Involved. Le nom traduit notre volonté d’associer à notre démarche tout notre écosystème : les partenaires, les prestataires, les parcs, les agences, les exposants, les visiteurs ont tous un rôle à jouer dans notre démarche d’amélioration continue.

Quels sont les trois piliers de cette stratégie ?

Le premier concerne Comexposium en tant qu’organisateur. Nous produisons près de 400 événements par an, des salons grand public, des salons professionnels, des formats one-to-one, des congrès, etc. Chaque format a ses spécificités. L’enjeu est d’abord de mieux opérer chaque événement, de réduire son impact environnemental en travaillant dès sa conception selon la méthodologie des 5 « R » : repenser, refuser, réduire, réutiliser, recycler.

Le second pilier concerne Comexposium en tant qu’employeur et acteur de la filière. Il touche la formation, le développement des compétences, l’équilibre vie professionnelle et personnelle. Il inclut aussi le travail de co-construction avec les prestataires, fournisseurs et partenaires, pour identifier de nouvelles solutions responsables et partager les bonnes pratiques.

Le troisième pilier concerne Comexposium comme animateur de communautés. Nos salons représentent tous des écosystèmes eux-mêmes challengés par les enjeux de durabilité : l’optique avec le Silmo, l’alimentation avec le SIAL, les vins et spiritueux avec Wine Paris, la mode avec Who’s Next, la construction avec Intermat… Chaque filière vit ses propres transformations durables. Pour les accompagner, notre rôle, en tant que média, est d’intégrer ces enjeux dans notre offre d’exposants innovants, notre programmation de contenus, nos conférences, remises de prix, dispositifs pédagogiques, etc.

Cette démarche est-elle différente selon que l’événement est propriétaire ou organisé pour un tiers ?

Depuis All Involved, le sujet est systématique. Chaque direction d’événement doit réfléchir à l’ambition RSE du salon, qu’il soit propriétaire ou non. Sur certains événements, nous avons même créé des comités RSE réunissant des exposants et des représentants de la filière, afin de partager les enjeux et co-construire des solutions.

La différence tient surtout à la maturité des secteurs. L’optique lunetterie, par exemple est très engagée, l’alimentation aussi. Certaines filières sont moins matures, mais aucune aujourd’hui n’ignore les enjeux de durabilité.

Comment adaptez-vous la stratégie All Involved à l’international ?

Nous souhaitons la déployer partout, mais les réglementations et usages diffèrent selon les pays. Aujourd’hui, nous sommes surtout dans la sensibilisation et le partage de bonnes pratiques. Nous travaillons à un socle commun d’engagements, afin que chaque pays puisse adapter ses engagements à ses spécificités locales.

Certains marchés offrent même des marges d’innovation. Au Danemark, nous avons lancé Building Green, un salon sur la construction verte. En Asie, nous sentons une volonté d’avancer. À Singapour par exemple, où les infrastructures sont récentes, certains parcs ont des pratiques avancées en termes de maîtrise énergétique et d’accessibilité. Notre filiale indonésienne vient de lancer un salon sur les risques climatiques, EDRR, à Jakarta. C’est très révélateur.

La thématique RSE subit un backlash dans le débat public, voire même au sein de certaines entreprises. Est-ce aussi votre perception ?

Non. Il peut y avoir un allégement sur la question du reporting, notamment dans le cadre des réflexions autour de la CSRD, mais pas sur le sujet de fond. Le développement durable n’est pas une tendance. C’est un enjeu structurel. Qui plus est, les secteurs que nous adressons, tels le retail, la construction, les transports, l’alimentation, sont directement concernés.

La décarbonation des événements reste l’enjeu le plus complexe. Comment l’abordez-vous ?

C’est un sujet complexe parce qu’un grand salon implique des milliers de mètres carrés, des milliers d’exposants, une grande variété de matériaux, des transports internationaux. Le dernier bilan carbone que nous avons réalisé sur l’exercice 2024 à l’échelle du Groupe, intègre le scope entreprise et le scope événements. Nous avons modélisé les émissions de différentes typologies de stands et intégré les déplacements visiteurs et exposants, de leur point de départ jusqu’au salon. Nous voulions une vision exhaustive pour comprendre où agir et influencer, au-delà de notre zone de responsabilité directe.

Sur les formats one-to-one, où nous organisons tout de A à Z, la maîtrise est plus simple. À Biarritz, par exemple, nous avions calculé qu’un passage massif de l’avion au train réduirait d’environ 40% l’empreinte carbone. Nous avons sensibilisé les participants, et cela a bien fonctionné.

Sur les grands salons internationaux, le sujet du transport est important. Mais nous avons aussi de gros enjeux sur notre propre périmètre, avec la moquette, les matériaux, les aménagements, la restauration, etc. Nous réutilisons des scénographies, mutualisons des espaces organisateurs d’un salon à un autre et réduisons autant que possible les matériaux difficiles à revaloriser comme le coton gratté.

Comexposium a également engagé une démarche de labellisation. Pour quelles raisons ?

Sur nos événements, nous avons expérimenté plusieurs labels, comme LEAD ou REEVE, pour engager les équipes dans une démarche d’amélioration continue. Nous voulions aussi évaluer notre stratégie globalement. Le choix du label Positive Company® s’est imposé parce que leur évaluation repose à parts égales sur l’audit des pratiques et sur trois enquêtes menées auprès des collaborateurs, des fournisseurs et des exposants. Les retours ont été très riches. Nous avons obtenu, en mai dernier, le niveau 2 sur 3. Nous sommes les premiers organisateurs d’événements à engager une démarche de ce type.

Quels sont les enjeux prioritaires du groupe pour les prochains mois ?

Le premier est la sensibilisation. Les exposants, les partenaires, nos fournisseurs souhaitent être davantage accompagnés et nous avons un rôle d’influence certain. Le second est la décarbonation, avec l’objectif d’affiner notre trajectoire en cohérence avec les travaux menés par l’UFI. C’est essentiel pour avancer collectivement. Le troisième concerne la montée en compétences. Les équipes opérationnelles sont déjà très impliquées. L’enjeu est d’impliquer davantage toutes les fonctions, y compris les commerciaux, car la RSE est l’affaire de tous. Le chemin vers davantage d’engagements se poursuit, et c’est véritablement enthousiasmant ! 

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